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Décarbonation maritime : les bateaux cherchent la bonne prise

le secteur maritime représente 3% des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Les professionnels de la filière cherchent de nouvelles solutions pour décarboner leur activité. La propulsion électrique présente des atouts mais sa mise en œuvre n’est pas si simple.

Pour faire le point sur les dernières innovations et les enjeux de la propulsion électrique appliquée aux navires maritimes et fluviaux, les professionnels du bateau électrique s’étaient donné rendez-vous le 23 mai à Dinan à l’appel de l’AFBE (association française du bateau électrique). L’occasion de prendre la mesure des nombreuses innovations technologiques en cours de développement et des initiatives en faveur d’une navigation décarbonée.

Mix énergétique renouvelable

Et si après l’automobile, les navires mettaient à leur tour le cap sur la mobilité décarbonée ? Alors que selon les chiffres officiels du secrétariat d’État chargé de la mer, le secteur maritime représente 3% des gaz à effet de serre au niveau mondial, la filière cherche à réduire ses émissions polluantes en travaillant à des propulsions plus respectueuses de l’environnement. Le grand retour du transport à la voile s’accompagne également de nombreuses initiatives en faveur des motorisations hybrides ou électriques. Il en a été question tout au long de la Première journée du bateau électrique le 23 mai à Dinan. “Je crois au mix énergétique renouvelable, je plaide en faveur du droit à l’expérimentation”, a affirmé Catherine Chabaud, députée européenne et ancienne navigatrice de course au large, grand témoin de cette journée.

Catherine Chabaud - crédit photo : ©Ilago

Faciliter les manœuvres de port

Si les solutions techniques se multiplient depuis quelques années avec la mise au point de moteurs de plus en plus efficaces, le déploiement de ces solutions se heurte encore à de nombreuses difficultés. La question de l’autonomie est souvent évoquée pour expliquer la réticence des usagers. D’où l’idée d’utiliser ces moteurs en complément d’un moteur thermique classique, pour faciliter par exemple les manœuvres de port, de manière silencieuse et sans émission de particules fines. C’est la démarche menée par la compagnie Brittany Ferries qui investit dans 2 nouveaux navires hybrides qui seront mis en service en 2025 pour le trafic trans-Manche. “Leurs moteurs électriques seront utilisés dans le chenal et l’accès au port et ils pourront être rechargés à quai”, explique Brice Robinson, responsable études et projets de Brittany Ferries. 

Barge ostréicole de Bretagne Sud (©Ouest-France)
Schéma des navettes électriques sur la Tamise (©OCEA)

La barge ostréicole électrique, avec panneaux photovoltaïques et éolienne, en service dans les parcs oestréicoles de Bretagne Sud (à gauche). A droite, l’image animée représente les futures navettes électriques d’OCEA sur la Tamise.

Écosystème fragile

Sur des trajets courts en revanche, avec des bornes de recharges facilement accessibles, l’électrique peut faire la différence. OCEA l’a bien compris : ce chantier naval des sables d’Olonne s’apprête à vendre 3 bateaux électriques à une compagnie de transport londonienne pour effectuer la traversée de la Tamise. Cette solution s’est révélée beaucoup plus écologique et économique que la construction du pont initialement envisagée. Autre exemple : celui des conchyliculteurs du Morbihan qui ont décidé de construire une barge électrique pour intervenir dans leurs parcs à huîtres et à moules en respectant l’environnement. “Nous travaillons dans un écosystème fragile, nous devons le respecter et cette initiative y contribue”, souligne Frédéric Coudon, vice-président du Comité régional de la conchyliculture de Bretagne Sud, qui a bénéficié d’un financement de 300 000€ dans le cadre du plan de relance pour lancer ce démonstrateur. 

« Je souhaite que l’Europe devienne la championne des navires verts. »

Catherine Chabaud, députée européenne et navigatrice

Bateau fluvial du futur

Cette idée de démonstrateur, c’est aussi celle de Grégoire Jourdan-Gassin, délégué à la transition énergétique de la Communauté portuaire de Paris, l’association des armateurs et des opérateurs économiques liés à la Seine. Avec la perspective des JO 2024, il lance un appel à projet pour mettre au point un prototype français de bateau fluvial du futur. “Nous avons mené une étude sur les 150 bateaux de la flotte parisienne en 2019, qui affichent une moyenne d’âge de 60 ans. Il y a un vrai potentiel pour la moderniser, la décarboner et la rendre plus durable”, explique-t-il, en appelant de ses vœux une évolution de la réglementation nationale et européenne pour faciliter cette transition. De son côté, la députée européenne Catherine Chabaud en a fait son cheval de bataille en souhaitant “faire de l’Europe la championne des navires verts”. “Nous devons encourager les coopérations industrielles à l’intérieur de l’Union et relancer la construction navale européenne”, souligne la première femme à avoir bouclé un Vendée Globe en 1997. 

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TEMO joue la proximité

Impossible ici de citer les nombreuses innovations présentées lors de la première journée du bateau électrique. Certaines sont très techniques et visent des applications industrielles. D’autres, en revanche, s’adressent à un plus large public, à l’image de TEMO. Cette start-up nantaise créée en 2018, a mis au point un petit moteur hors-bord destiné aux annexes (ces petites embarcations utilisées pour atteindre un bateau depuis le rivage). Son équipe de 15 personnes met un point d’honneur à fabriquer leurs produits localement. Ainsi, tous les composants sont sourcés à moins de 100 kilomètres de Nantes. Présent dans 34 pays à travers 300 points de ventes, TEMO a réalisé un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros en 2022 et  ne compte pas en rester là. Elle s’est fixé plusieurs défis à l’horizon 2026. Au menu : mise en place d’un SAV (service après vente), développement de la gamme avec 3 nouveaux modèles à venir et un déploiement commercial aux États-Unis et au Canada. Dernier défi, et non des moindres:  un projet de recyclage des produits en fin de vie visant le 0 déchet. Pour en savoir plus, retrouvez ci dessous l’interview de Thibaut Coutansais, brand manager de Temo.

Bastien Baehr, avec X.D.

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