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Les festivals engagés dans l'éco-responsabilité

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Crédit photo : Les Vieilles Charrues

En Bretagne, une cinquantaine de festivals se déroulent tout l’été. Face aux enjeux climatiques, de nouvelles priorités apparaissent dans leur organisation. Comment rendre un festival éco-responsable ? Éléments de réponse avec la démarche des Vieilles Charrues et de La P’Art Belle.

14.000 tonnes de CO2 : c’est le bilan carbone d’un festival de 280.000 participants sur 4 jours, selon l’étude “Décarbonons la culture !” du “Shift Project” paru en novembre 2021. Gestion de l’eau, des déchets, de la biodiversité, de l’énergie et du transport sont autant d’enjeux qui s’imposent aux organisateurs. Quentin Siberil, chargé de projet développement durable au sein du festival des Vieilles Charrues, et Louise Robert, fondatrice et coordinatrice du festival “La P’Art Belle” nous dévoilent les coulisses de leur festival. 

Réduire et valoriser au maximum les déchets

Les Vieilles Charrues, le plus gros festival de Bretagne, qui accueille plus de 250 000 personnes sur 4 jours, fait le choix d’utiliser le même visuel sur ses gobelets depuis 2014. Cette solution évite la dimension collector du gobelet et incite les festivaliers à les remettre dans le circuit de la consigne. Mais le festival va plus loin et effectue un tri sélectif. Au total, plus de 800 containers poubelles, 30 bennes, 60 futs, 50 supports de tri et 30 palox biodéchets (qui permettent une revalorisation des biodéchets en circuit court) sont répartis sur tout le site, atteignant 43% des déchets valorisés. “On a toujours profité du festival pour encourager les bonnes pratiques”, argumente Quentin Siberil, chargé de projet développement durable au sein des Vieilles Charrues. Enfin, pour mobiliser, le tri peut être ludique. Au camping des Vieilles Charrues, on peut ramener des sacs de tri rempli à des points de collectes pour obtenir des cadeaux (places, montées sur scène, voyage, etc.).

Crédit photo : Les Vieilles Charrues

Du côté du festival “La P’Art Belle”, dans le pays de Vannes, on va plus loin. Les festivaliers sont invités à venir avec leurs propres gobelets, contenants et couverts. Cette initiative, appelée l’opération “Sors tes couverts”, a permis de diviser par 2 la quantité de déchets des festivaliers. Une nouvelle action est en préparation : “finger food”. Le but : proposer une restauration originale en utilisant comme couverts… ses doigts. “On propose ainsi une nouvelle expérience de festival”, explique Louise Robert, fondatrice et coordinatrice générale du projet.

Toutes ces nouvelles tendances bouleversent les habitudes. C’est ce qu’a compris depuis 2010 la société Esprit Planète, qui fournit des gobelets en plastique consignés. “Le point primordial est de limiter le nombre de déchets”, explique Laurent Guillet, directeur marketing d’Esprit Planète. Cette entreprise rennaise, fournit de nombreux festivals sur tout le Grand-Ouest. 

Les énergies renouvelables omniprésentes

Beaucoup de festivals s’alimentent avec des groupes électrogènes qui fonctionnent au gasoil. Ces sources d’énergies émettent 3 fois plus de CO2 qu’un réseau public de distribution d’électricité. 

Le festival la P’Art Belle utilise un nouveau système électrique pour le son : des enceintes solaires, développées par EvenTerra et raccordées à des panneaux photovoltaïques. “Chaque année, on améliore le système”, explique Louise. Par ailleurs, le festival étant basé près de Vannes, il a pu se raccorder au réseau public de distribution.

Pour les Vieilles Charrues, la question ne fût pas simple. En effet, doté de groupes électrogènes, le festival ne cesse de trouver des solutions alternatives depuis 2007. Par exemple, des minuteurs et un éclairage led permettent de réduire la consommation. Les campings, trop éloignés du réseau, sont équipés de panneaux photovoltaïques. Toutefois, les groupes électrogènes sont utilisés pour alimenter les 3 scènes et servir d’alimentation de secours. À l’issue de cette édition, le festival mesurera sa consommation pour cibler au mieux les besoins en énergie. “On veut mesurer les solutions d’utilisation du réseau à l’instant T en réduisant encore la part des groupes électrogènes”, confie Quentin. 

« Il faut réaliser davantage de petits événements qu’un seul gros »

Émilie Cherbonnel, responsable communication du Collectif des festivals.

De nouveaux modes de transport

Selon une étude du Collectif des festivals, qui accompagne les festivals et manifestations culturelles dans leurs démarches de transition écologique et sociale, 69% des festivaliers utilisent la voiture pour se rendre à leur concert préféré, ils ne sont que 16% à préférer le train ou le bus. 

Pour le festival la P’Art Belle, un parking à vélo a été installé. Et, pour motiver les festivaliers à pédaler, un projet de parcours animé avec des artistes ou de la musique est en réflexion. 

Pour les Vieilles Charrues, le festival a mis en place des navettes gratuites en partenariat avec Poher Communauté. Ensuite, le Conseil Régional de Bretagne, en partenariat avec la SNCF, et les Vieilles Charrues, unissent leurs forces pour proposer aux festivaliers une offre unique sur tout le réseau TER Bretagne et car Breizhgo. Enfin, le festival se lance sur une étude du bilan carbone des transports. Objectif : mesurer l’impact des transports des festivaliers, des artistes et de la flotte interne de véhicule. 

Crédit photo : Esprit planète
Crédit photo : le Collectif des festivals
Crédit photo : Les Vieilles Charrues

L’eau et la biodiversité : des enjeux à impact

Pour le Collectif des festivals, 2 axes importants sont à prendre en compte : l’enjeu de la biodiversité et de l’eau. Encore en recherche de solution, le premier choix à mettre en place est celui des toilettes sèches. Pour le collectif, ces toilettes permettent d’économiser 320.000 litres d’eau par jour (soit 36.000 packs d’eau).

Le festival la P’Art Belle, situé dans des parcs arborés, utilise des toilettes sèches, ce qui sensibilise le public à l’écologie et à l’éco-citoyenneté. 

Pour les Vieilles Charrues, 175 cabines de toilettes sèches sont déployées. Ce choix permet au festival de distribuer du compost à un agriculteur local pour faire l’objet d’un plan d’épandage. De plus, le festival dispose de sa propre infrastructure de lavage pour limiter l’utilisation de l’eau. “On est très peu gourmand en eau”, confie Quentin. Par ailleurs, le festival a mis en place des boutons poussoirs sur les sanitaires et fontaines à eau, réduisant le gaspillage. Enfin, les Vieilles Charrues ont mis en place un partenariat avec Ecotree, leader des solutions fondées sur la nature en Europe. Ce dernier, depuis 2022, propose aux festivaliers de faire don de leur euro de consigne pour participer au projet de reboisement de la forêt de Langonnet (située à 25km du lieu du festival). En 2022, 1.500 jeunes plantes ont été plantées et le festival espère retrouver ce chiffre en 2023.

Et si la solution n’était pas de changer d’échelle ? “Il faut réaliser davantage de petits événements qu’un seul gros”, confie Émilie Cherbonnel, responsable communication du Collectif des festivals. La P’Art Belle a fait le choix de réduire la jauge maximale de festivaliers à 1.000 personnes par jour. “Cette solution permet de respecter les lieux qui nous accueillent”, argumente Louise.

Bastien BAEHR

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