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Charly, un petit boitier pour que tout le monde descende du car scolaire
- Chaque année, des enfants sont « oubliés » à l’arrière d’un car scolaire
- Kanopé Innovations a conçu un petit boitier qui sonne dès que le moteur est coupé et que le conducteur doit éteindre en allant au fond du véhicule.
- Le boitier Charly équipe déjà la flotte de son partenaire Linevia
La jeune société morbihannaise Kanopé Innovations a mis au point un dispositif de sécurité pour éviter que des enfants soient enfermés par inadvertance dans le car scolaire après la tournée. Son boitier est produit localement par des conducteurs de l’entreprise de transports Linevia, son partenaire.
Il se remarque à peine, fixé sur la paroi du car, au-dessus de la vitre arrière. Ce petit boitier noir, baptisé Charly par ses concepteurs, a une mission toute simple : éviter que des enfants soient « oubliés » dans le car de ramassage scolaire. En cette période de rentrée, l’anecdote pourrait faire sourire. Pourtant, chaque année, rien qu’en France, on recense une dizaine de cas d’écoliers qui se retrouvent enfermés dans le car plusieurs heures durant, parce que le chauffeur a quitté son véhicule sans apercevoir la petite silhouette assoupie sur les sièges du fond. Avec, parfois, des conséquences dramatiques.
Au Japon, en septembre 2022, un enfant de 3 ans a succombé à un coup de chaleur après avoir passé plusieurs heures dans un véhicule hermétiquement fermé en plein soleil. Depuis, la réglementation japonaise impose aux transporteurs de s’équiper d’une alarme pour qu’un tel drame ne se reproduise pas.
Oublis de contrôle
À Guer, dans le Morbihan, un tel système existe déjà. Il a été conçu par Kanopé Innovations, une jeune société partenaire du groupe familial de transports Linevia. « Nous sommes partis du principe que les conducteurs faisaient bien leur travail, mais il existe des « oublis de contrôle », issus d’un conflit de mémoire. Le boitier Charly permet d’y remédier facilement », explique Loïc Aubin, directeur général de Kanopé Innovations.
Comment ça marche ? Le principe est simple : le boitier, muni d’une lampe et d’un avertisseur sonore, se déclenche automatiquement lorsque le conducteur éteint son moteur après 10 minutes de fonctionnement. Il est alors obligé de traverser toute la longueur de son véhicule pour l’éteindre manuellement en pressant un bouton. Ce simple geste lui permet, au passage, de vérifier que tout le monde est bien descendu au dernier arrêt.
Solutions de mobilités
L’aventure est née, comme souvent, d’une rencontre. Celle de Loïc Aubin, qui a connu plusieurs vies professionnelles dans le privé et la vie publique (il a été élu local), avec les frères Herviaux, dirigeants du groupe Linevia. « En 2016, J’ai créé Kanopé Mobilités, à 50/50 avec Linevia, pour proposer des bouquets de solutions de mobilités, autour de Ploërmel. Nous avons créé des lignes régulières de bus, mis en place de la location de vélos à assistance électrique en milieu peu dense », énumère l’entrepreneur morbihannais. Et c’est en répondant à un appel d’offres lancé en 2021 par la région Pays de la Loire que la société se penche sur une « solution pour contrôle du dernier passager ».
« Nous avons questionné les chauffeurs de car pour connaitre leurs besoins. Ils souhaitaient un dispositif sans abonnement, facile à installer, accessible ».
Louise Le Tallec, cheffe de projets chez Kanopé Innovations
Un an de recherche et développement
« Nous avons questionné les chauffeurs de car pour connaitre leurs besoins. Ils souhaitaient un dispositif sans abonnement, facile à installer, accessible, pas un outil de contrôle de leur activité », rappelle Louise Le Tallec, cheffe de projet chez Kanopé Innovations, la filiale de Kanopé Mobilités créée début 2022 pour développer le projet Charly. Muni de ce cahier des charges, Loïc et Louise sont allés trouver Vincent Denis, le patron d’une entreprise voisine, Sadal Engineering, à Guer, spécialiste du prototypage et de l’innovation. Au bout d’un an de recherche et développement, le boitier devenait réalité. Sadal est d’ailleurs depuis entré au capital de Kanopée Innovations.
Production internalisée
Quant à la production proprement dite du boitier, elle relève d’une organisation originale. L’assemblage des différents composants, dont la carte électronique fabriquée par l’entreprise Adex Electronique, de Saint-Domineuc (35), est réalisée en interne, par des conducteurs volontaires qui cherchent à compléter leurs heures entre la tournée du matin et le ramassage du soir. « Ils ont bénéficié d’une formation assurée par l’UIMM et la production dans notre atelier de Guer a démarré en février 2023. Nous avons même des retraités de Linevia qui ont souhaité revenir travailler quelques heures avec leurs anciens collègues ! », souligne Louise Le Tallec, qui précise que cette formule permet aussi d’attirer des candidats dans un secteur en tension. Un coup de pouce à la marque employeur, en quelque sorte. Au fait pourquoi ce nom, Charly ? « Parce qu’à la question : où est Charly, nous pouvons désormais répondre : pas dans le car ! », sourit Louise.
1000 boitiers fin 2024
Actuellement, 400 boitiers Charly ont été produits, et les 170 cars scolaires de Linevia en sont équipés. Les autres ont rejoint des compagnies normandes, auvergnates et bordelaises. Le marché français est significatif : on recense 30.000 cars scolaires dans l’Hexagone. Commercialisé 349 euros et garanti 7 ans, le petit boitier pourrait bientôt sonner loin des routes bretonnes. « Nous visons 1000 boitiers produits fin 2024 », confie Loïc Aubin, qui travaille déjà avec ses équipes à une V2 capable de communiquer de l’information d’exploitation des véhicules.
Pour François Herviaux, PDG de Linevia et de Kanopé Innovations, cette initiative s’inscrit clairement dans la démarche RSE de l’entreprise. « Nous sommes également engagés dans une politique de décarbonation de notre flotte, avec la mise en place de véhicules roulant au bio GNV. Nous voulons ramener notre impact carbone à ce qu’il était en 2000 », affirme le dirigeant. Une ambition qui passe notamment par des plantations d’arbres à proximité des dépôts de l’entreprise, en Bretagne et en Mayenne.
Xavier DEBONTRIDE