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Clarisse Le Court se bat pour la santé intime des femmes
- Son entreprise, claripharm, est spécialisée dans les dispositifs pour l’hygiène intime féminine
- Elle lutte contre la précarité menstruelle
- Elle innove en permanence et veut lever 3 millions d’euros
Fondée en 2013 à Saint-Alban, près de Lamballe (22), Claripharm multiplie les initiatives pour accompagner les femmes dans leur santé intime. Produits recyclables, kits de sensibilisation aux premières règles, dispositifs médicaux adaptés aux attentes des femmes… Sa fondatrice et dirigeante, Clarisse Le Court, fait le point sur sa stratégie pour MAPInfo.
Faire tomber le tabou des règles
Le ton est posé, le regard clair et décidé. Rencontrée au lendemain du vote historique du Congrès sur la constitutionnalisation du droit à l’IVG, Clarisse Le Court parle sans détour, comme à son habitude. « Cette décision sécurise l’affaire ! Ce droit ne pourra plus être retiré facilement aux femmes », souligne-t-elle dans un grand sourire, en ajoutant immédiatement que cette appréciation n’engage qu’elle, et pas son entreprise.
Elle est comme cela, Clarisse Le Court. Sans langue de bois, avec des convictions fortes et une énergie folle pour défendre les causes qui lui tiennent à cœur. Celle des femmes, et de leur santé intime, en particulier. Elle en fait la raison d’être de sa société, Claripharm, créée en 2013, après la naissance de sa fille, sur le créneau des dispositifs médicaux pour l’hygiène intime féminine (coupes et culottes menstruelles, serviettes hygiéniques, etc.).
En dix ans, l’entreprise costarmoricaine, implantée à Saint-Alban près de Lamballe, a fait sacrément bouger les lignes et tomber les tabous autour des règles, notamment dans le monde professionnel.
Entreprise à mission
Et pour y parvenir, Clarisse Le Court, pur produit de la Medtech, ce secteur qui associe technologie et médical, a su exploiter toutes les dispositions réglementaires, quitte à déplacer des montagnes. En 2022, Claripharm a ainsi été la seule société française sélectionnée aux côtés de 36 autres par l’UNFPA, l’agence directrice des Nations Unies en charge des questions de santé sexuelle et reproductive, dans le cadre d’un appel d’offres portant sur les produits d’hygiène féminine pour les distribuer dans 193 pays auprès de femmes en précarité menstruelle. « C’était l’aboutissement de deux ans de travail acharné », se souvient Clarisse.
Devenue entreprise à mission la même année, Claripharm n’en perd pas pour autant le sens des affaires et multiplie les initiatives commerciales pour toucher les femmes salariées… et sensibiliser leurs collègues masculins. « Nous déployons des distributeurs de protections hygiéniques dans les entreprises, et tous les salariés, hommes et femmes, bénéficient de 50% de réduction sur l’ensemble de notre catalogue », explique Clarisse, qui redonne ainsi du pouvoir d’achat aux salariés en permettant que le sujet des règles puisse être abordé simplement, au travail comme en famille. Les entreprises qui s’engagent dans la démarche cherchent à valoriser leur marque employeur, mais cela va bien au-delà et peut vraiment modifier le dialogue hommes-femmes dans les bureaux ou les ateliers. Plusieurs entreprises costarmoricaines ont déjà franchi le pas, comme les concessions automobiles Bodemer, la Cooperl ou le Crédit Agricole des Côtes d’Armor, qui sera bientôt suivi par son homologue Atlantique-Vendée.
« La force de Claripharm, c’est l’innovation et l’agilité. Nos produits sont ultra-référencés, ils répondent aux exigences internationales. D’ici à la fin de l’année, nous voulons lever 3 millions d’euros pour aller encore plus loin ».
Clarisse Le Court, fondatrice
Onze ans de R&D
Cette année, Claripharm s’est fixé trois grands objectifs : répondre à la problématique de la précocité menstruelle en allant distribuer des kits « premières règles » dans les écoles primaires, peser dans le débat public pour faire reconnaitre ses produits réutilisables comme des dispositifs médicaux remboursables (ce qui est le cas dans de nombreux pays, sauf en Europe), et enfin, lancer son produit Claricare, à l’origine de l’entreprise et qui a bénéficié de 11 ans de recherche et développement. Ce dispositif médical adapté à la morphologie féminine permet de limiter la douleur après la pose de points de sutures sur les parties intimes, par exemple. C’est précisément parce qu’à la naissance de sa fille, Clarisse n’avait pas trouvé de produit la soulageant dans la période post-accouchement, qu’elle s’était lancée dans l’aventure entrepreneuriale pour apporter des solutions concrètes à ces problématiques spécifiques.
Pour accélérer son développement, Clarisse ne manque pas d’idées. « La force de Claripharm, c’est l’innovation et l’agilité. Nos produits sont ultra-référencés, ils répondent aux exigences internationales. D’ici à la fin de l’année, nous voulons lever 3 millions d’euros pour aller encore plus loin », confie la dirigeante de cette société 100% féminine, qui emploie une quinzaine de collaboratrices et ne divulgue pas son chiffre d’affaires pour des raisons de concurrence.
Et parce que, décidément, elle veut viser les étoiles, Claripharm a répondu en 2023 à un appel d’offres du CNES (Centre national d’études spatiales) pour mettre au point une coupe menstruelle adaptée à une utilisation dans l’espace. « Nous nous intéressons notamment aux effets de la micropesanteur sur le cycle féminin », précise Clarisse. Premiers résultats de l’étude, à la fin de l’année, en principe. De quoi repousser un peu peu plus encore les limites pour trouver des réponses concrètes à des questions concernant… la moitié de l’humanité !
Xavier DEBONTRIDE