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Les conventions pour le climat séduisent les entreprises et l’Université
- La deuxième CEC Ouest est sur les rails
- L’université de Rennes prépare sa Transition
- Un parcours très balisé qui débouche sur des changements profonds
Coup sur coup, à Rennes, le monde académique et entrepreneurial se met en mouvement à l’heure des transitions. La deuxième convention des entreprises pour le climat (CEC Ouest) se prépare à accueillir sa prochaine promotion. De son côté, l’Université de Rennes embarque ses collaborateurs pour une Convention de l’Université en Transition, de mai à janvier, selon une méthodologie partagée avec la CEC.
Vocation et responsabilité
Quand le monde académique suit les traces des entreprises sur le chemin des transitions, cela donne une convention calquée sur le modèle de la convention des entreprises pour le climat. Alors qu’un premier bilan de la première CEC Ouest vient d’être tiré par ses promoteurs, l’Université de Rennes se lance à son tour dans l’aventure avec la première Convention de l’Université en Transition.
« Nous avons une vocation et une responsabilité par rapport aux transitions », affirme son président David Allis, revendiquant une approche systémique, complète, pour « repenser nos manières de faire ». Au sein de cette université qui forme 37.200 étudiants sur 9 campus, ce sont 160 personnes (personnels administratifs, enseignants, représentants des étudiants) qui vont suivre ce parcours de 10 mois en 6 étapes, de mai à janvier 2025.
Comme pour les entreprises, l’impact de l’activité de l’Université de Rennes et de ses établissements composantes va être ausculté à l’aune des limites planétaires, tout en mettant l’accent, pédagogie oblige, sur la formation de la totalité des étudiants à ces problématiques, qui ne sont définitivement plus une option. « Une convention de cette ampleur n’a jamais été tentée au niveau national, ses résultats feront l’objet d’un travail de recherche, pour évaluer ce qui fonctionne et ce qui n’a pas marché. Nous voulons en faire un processus pédagogique de transformation », précise Eric Hitti, vice-président de l’Université.
Vers l’entreprise régénérative
Du côté des participants de la première CEC Ouest, en revanche, les résultats sont déjà là. Ils ont été présentés en début de semaine à Rennes par ses organisateurs, en présence de plusieurs participants venus témoigner de la transformation vécue durant ce parcours de 10 mois. L’objectif est à la fois clair et ambitieux : il s’agit de « rendre irréversible la bascule d’ici à 2030 d’une économie extractive à une économie régénérative ». Derrière cette expression, il y a l’idée que l’entreprise peut réinventer son modèle économique pour préserver les ressources planétaires, de manière concrète.
L’année dernière, ce sont 62 organisations qui se sont embarquées, représentées chacune par un binôme dirigeant/collaborateur (appelé « planet champion »), soit 120 personnes aux profils très diversifiés. Au total elles représentaient 72.000 salariés, pour un chiffre d’affaires cumulé de 14 milliards d’euros. L’expérience, visiblement, a laissé des traces. « Après la claque, on a la niaque ! », résume un participant avec le sens de la formule. La claque, elle est reçue dès les premières journées, avec la prise de conscience de l’urgence absolue d’agir vite pour éviter la catastrophe. La niaque, elle, vient de l’émulation collective au sein du groupe qui apprend petit à petit à se connaitre, et à co-construire des solutions.
Comme par exemple, à la SNCF, qui à l’issue du parcours, a décidé de renaturer un terrain ferroviaire aux abords du Technicentre, à Rennes (le site de maintenance des rames). « Sur 17 hectares, nous ne recensions qu’un seul arbre ! Il faut savoir qu’à la SNCF, la nature est perçue comme un risque qui bloque les trains », rappelle non sans humour Nicolas Poisson, le directeur du Technicentre. Grâce à la rencontre de plusieurs partenaires, dont le cabinet de géomètres experts Prigent & Associés, le réseau Graal et l’Institut Agro Rennes Angers, une plantation de 25 arbres et 180 arbustes sur près de 1.000 mètres carrés a été réalisée le 23 mars dernier. Une seconde opération, sur 5000 mètres carrés cette fois, est à l’étude.
Près de 1000 m2 de terrain près du Technicentre de la SNCF ont été renaturés le 23 mars. Une initiative concrète découlant de la CEC Ouest (© SNCF)
« L’immensité et l’imminence des enjeux nous ont tous frappés en pleine face, et cela donne envie de s’engager concrètement ».
Tiphaine Turluche, dirigeante des Bottes d’Anémone
Montrer que la tranformation est possible
Autre témoignage: celui d’Aurélie Tacquard, dirigeante de Galapagos Gourmets qui produit de nombreuses marques de biscuits (Gavottes, Traou Mad, biscuits roses de Reims…) « Nos 9 usines fabriquent des produits, mais elles transmettent aussi des savoirs-faire. Nous les appelons désormais des sites de transmission. La CEC nous a permis de regarder l’entreprise sous un autre angle, en prenant en compte notre impact et notre vulnérabilité par rapport à nos ressources en eau, en matières premières, en énergie… », explique Aurélie.
Tous les participants à cette première session s’accordent à reconnaitre l’impact transformatif du parcours : « l’immensité et l’imminence des enjeux nous ont tous frappés en pleine face, et cela donne envie de s’engager concrètement, en mettant en place des outils de mesure de nos actions (bilan carbone, bilan biodiversité… », résume Tiphaine Turluche, dirigeante des Bottes d’Anémone, à Vannes, qui veut réinventer le métier de fleuriste en proposant des fleurs locales et de saison.
Le risque, après avoir ainsi été bousculé en profondeur ? « C’est celui de revenir dans son entreprise avec l’attitude du Témoin de Jéhovah qui cherche à convertir tout le monde et passe pour un illuminé », souligne Magali Euverte, responsable des TER Bretagne à la SNCF et qui a suivi le parcours avec Nicolas Poisson. Pour éviter cet écueil, son conseil est simple : « il faut montrer aux équipes que la transformation est possible, à travers des actions concrètes, en s’appuyant sur les initiatives déjà présentes ». C’est ce que viendront sans doute chercher à leur tour les participants de la prochaine session, qui débutera le 1er juin prochain. Les inscriptions sont ouvertes.
« À la CEC Ouest, nous sommes convaincus de l’importance des petits pas, et de la force de la coopération entre acteurs d’un même territoire », souligne Sophie Leclercq, sa copilote. Une méthode qu’elle entend bien appliquer à la Convention de l’Université en Transition, qu’elle se prépare également à accompagner dans quelques semaines.
Xavier DEBONTRIDE