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Cet étudiant breton souhaite produire de l'électricité à partir d'urine
- Louison Jannee est étudiant en école d’ingénieur à Lorient
- À CÔTÉ DES COURS, IL DÉVELOPPE UN PROJET INTITULÉ « COLLECTE D’URINE BY L »
- La MISSION ? RÉCOLTER LES URINES DES FESTIVALIERS EN CRÉANT NOTAMmENT DES URINOIRS FÉMININs
- Et PRODUIre, grâce à ce liquide, DE L’ÉLeCTRCITÉ
Louison Jannee, étudiant en école d’ingénieur à Lorient, est en train de concevoir le prototype d’une pile à combustible microbienne, qui permettrait de transformer l’urine en électricité. Bénévole au festival « le Pont du Rock », il souhaite expérimenter le procédé dans les festivals bretons. Le jeune homme aimerait « lever les freins sur cette matière première » qui offre une solution énergétique prometteuse.
Valoriser les urines
Louison Jannee fait partie de la première promotion énergie hydrogène de l’École nationale des sciences de l’ingénieur Bretagne sud (ENSIBS). C’est un jeune étudiant de 21 ans, a priori comme les autres. À un détail près : il déborde d’inventivité. En parallèle de ses cours et de son alternance dans une Start-up AN-C, Louison mène un projet intitulé « Collecte d’urine by L ». Le but ? Collecter les urines des festivaliers lors de ces événements estivaux avec un objectif : les transformer en électricité.
C’est par son bénévolat au festival Au Pont du Rock à Malestroit que Louison s’est aperçu de la quantité d’urine disponible. « En tant que responsable développement durable, mon rôle était de savoir comment gérer le flux des toilettes chez les femmes. J’ai donc pensé à créer des cabines d’urinoirs féminines, comme il en existe ailleurs. Ensuite, je me suis demandé s’il était possible de valoriser cette matière première », raconte Louison.
Une pile à combustible microbienne
Après quelques recherches et grâce à l’aide d’un de ses professeurs Philippe Mandin, chercheur spécialiste de l’électrolyse et de la pile à combustible, Louison a finalement planché sur la création d’une pile à combustible microbienne, dont le prototype est encore à l’étude. « Elle fonctionne selon le principe d’oxydation-réaction. En fait, la pile se nourrit des bactéries contenues dans l’urine, qui vont se transformer en électrons et produire de l’électricité », explique le jeune ingénieur. Un autre procédé s’est présenté à lui : « créer de l’hydrogène grâce à l’électrolyse de l’urée ». Les recherches portent en fait sur ces deux options.
En parallèle de cette activité de recherche, Louison a conçu des cabines d’urinoirs féminines, qui seront installées le 2 et 3 août prochain au festival « Le Pont du Rock ». Il espère pouvoir les commercialiser cet été dans d’autres festivals bretons. La pile, quant à elle, ne sera pas opérationnelle pour l’été. « Le développement prend du temps », reconnaît-il.
Réduire l’empreinte carbone des festivals
Une fois que la technologie sera au point, à quoi pourrait bien servir cette électricité ? « Pour l’éclairage des sanitaires ou de la scène du festival, ou encore pour recharger son téléphone portable. On pourrait même imaginer remplacer les groupes électrogènes très polluants ». Ces derniers sont alimentés avec du carburant. Louison n’arrive pas encore à estimer la puissance qu’une telle technologie pourrait fournir, ni quelle quantité d’urine il faudrait pour alimenter un festival de la taille du « Pont du Rock ». En revanche, ses motivations sont claires. « L’idée c’est de réduire l’empreinte carbone des festivals ».
« L’idée c’est de réduire l’empreinte carbone des festivals »
Louison Jannee, étudiant à l’origine du projet « Collecte d’urine by L ».
Une technologie déjà expérimentée en Grande-Bretagne
Si l’idée de Louison de transformer l’urine en électricité semble révolutionnaire, la technologie n’est pas nouvelle. En Grande-Bretagne, des scientifiques du Centre de Bioénergie de Bristol ont créé Pee Power (le pouvoir du pipi en anglais). L’installation, qui contient 40 urinoirs, est présente depuis 4 ans au festival de Glastonbury. Louison a d’ailleurs été en contact avec les chercheurs à l’origine du Pee Power pour concrétiser son projet « Collecte d’urine by L ».
En Bretagne, d’autres festivals tels que les Transmusicales ou le festival Mythos valorisent les urines des festivaliers. Cette fois-ci, la matière organique ne sert pas à produire de l’électricité, mais devient un bio-stimulant pour fertiliser les terres agricoles. C’est la Start-up Toopi Organics, qui est à la manœuvre.
Récompensé aux Oscars du Morbihan
Quelque soit l’application, « des réticences sociales freinent l’utilisation de cette matière brute », constate Louison, qui en a fait les frais. À travers son projet, il souhaite donc « faire changer les mentalités, lever les tabous autour de l’urine, pour montrer qu’elle offre de réelles opportunités ». Son optimisme et son ingéniosité viennent d’être récompensés : il vient de remporter le prix étudiant entrepreneur lors des Oscars du Morbihan.
Adèle CHARRIER