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Éco-anxiété : et si l’on parlait plutôt d’éco-lucidité ?

Marine Lejeune, fondatrice de Lumiver, et Tanguy Descamps, enseignant et auteur de "Vivre avec l'éco-lucidité", participaient à cette soirée organisée par les Shifters Rennes le 5 juin.
  • L’éco-anxiété, alimentée par les menaces qui pèsent sur notre planète, est désormais prise au sérieux par la communauté scientifique.

 

  • Le groupe des Shifters de Rennes a organisé un débat sur ce thème le 5 juin.

 

  • Conclusion : on peut faire de l’éco-anxiété une alliée pour passer à l’action.

 

L’éco-anxiété se nourrit des catastrophes écologiques en cours et d’un sentiment d’impuissance à agir, pour soi et les générations futures. Pour autant, il est naturel de s’interroger, et l’éco-lucidité qui peut en découler est alors source de mise en mouvement.

8 Francais sur 10 inquiets

Un public jeune et largement féminin avait répondu présent à l’invitation lancée par le groupe rennais des Shifters (l’association de sensibilisation aux enjeux du changement climatique créée par le scientifique Jean-Marc Jancovici) pour débattre autour de l’éco-anxiété, dans le cadre du Printemps éco-citoyen de Rennes Métropole, le 5 juin. Au programme de cette soirée d’échange animée par Arthur Gosset, le réalisateur du documentaire « Ruptures » et cofondateur du forum Séisme : trois témoignages impactants et des partages d’expériences concrets, alors que 8 Français sur 10 se déclarent inquiets du changement climatique, selon une étude récente du CESE.

Anne-Catherine Lanchou, médecin, a partagé son cheminement en famille, avec ses quatre enfants et son mari, sur la voie d’une sobriété joyeuse qui a surpris son entourage. Marine Lejeune, fondatrice de Lumiver, est formatrice et facilitatrice sur les transitions et les éco-émotions. Elle insiste sur la place de ces émotions dans nos vies professionnelles et sur la manière de les accueillir pour les transformer en actions. Tanguy Descamps, enseignant et auteur de « Vivre avec l’éco-lucidité » (éditions Actes Sud), s’attache quant à lui au sens des mots et préfère parler de « politico-anxiété », développée face à l’absence de réponse organisée par le politique sur ces enjeux sociétaux fondamentaux.

 

Couverture du livre co-écrit par Tanguy Descamps avec Maxime Olivier, aux Editions Actes Sud

S’ancrer dans le réel

Ce qui frappe dans leurs témoignages, c’est que l’éco-anxiété, qu’ils ont personnellement expérimentée, a trouvé sa source première dans la connaissance du phénomène. Leur engagement s’est nourri de ce constat qu’il n’était pas possible de rester inactif face aux dépassements successifs des limites planétaires qui s’accélèrent.  Mais comment embarquer ses proches, sa famille, ses collègues, sans choquer et risquer de couper les ponts ? L’activisme doit-il être forcément radical ? Comment gérer la palette d’émotions qui s’invite au fur et mesure de la découverte de la situation (sidération, peur, colère, révolte, engagement ?) …

L’un des enseignements des échanges fut sans conteste la nécessité de s’ancrer dans le réel, en lien avec le Vivant pour ne pas perdre pied. « Je porte une radicalité sur le fond, mais je prône une diversité dans les actions à mener », souligne Tanguy Descamps. « Il faut accepter qu’on ne pourra pas convaincre tout le monde », reconnait Marine Lejeune. « Il faut garder le lien avec les personnes qu’on aime, et être fier de ce qu’on transforme », ajoute Anne-Catherine Lanchou.

«L’éco-anxiété est tout à fait légitime, comme une forme de lucidité, un sentiment normal, chez un individu sain vivant dans un monde malade. »

Les Shifters Rennes

Dans la salle, qui n’a pas besoin d’être convaincue de l’importance de l’engagement, les questions portent sur la manière dont on peut sensibiliser les plus jeunes, sans développer chez eux un sentiment d’angoisse face à l’avenir. L’une des participantes, enseignante, invite ainsi à développer la « pédagogie de l’émerveillement » en faisant découvrir les richesses de la nature aux enfants dès leur plus jeune âge. 

Pas de recette miracle, bien sûr. Mais la conviction que ces soirées comme celles-là sont nécessaires pour se reconnecter et ne pas se sentir isolé. Et surtout, que la connaissance des faits, loin d’être paralysante, peut être un déclencheur de la mise en mouvement. C’est en ce sens, comme l’indiquent les organisateurs de la soirée, que « l’éco-anxiété est tout à fait légitime, comme une forme de lucidité, un sentiment normal, chez un individu sain vivant dans un monde malade. Elle représente en effet une partie de la solution car elle offre l’énergie nécessaire à une mise en mouvement et à un engagement vers un avenir plus désirable ! ». Une prise de conscience salutaire.

X.D.

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