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[BILLET] Singa : un autre regard sur l’immigration
- Nadia Al Soleman est la présidente de Singa Nantes, une association qui met en relation exilés et professionnels
- Son témoignage à la Convention de l’Université en Transition résonne avec l’actualité
- Un message fort et solidaire
Professeure de Français, Nadia Al Soleman a fui sa Syrie natale en 2015 pour se réfugier en France avec son mari et sa fille. Aujourd’hui présidente de l’antenne nantaise de l’association Singa, elle porte un témoignage puissant sur la nécessité de considérer les exilés comme des personnes riches de leurs parcours humains et de leurs compétences professionnelles. Un message fort en ces temps incertains.
Un témoignage simple et puissant, antidote calme et efficace à tous les lendemains de scrutins inquiétants. Nadia Al Soleman intervenait ce lundi matin 1er juillet devant les participants de la Convention de l’Université en Transition, réunis à Rennes pour leur deuxième session.
Cette jeune femme syrienne est aujourd’hui présidente de l’association Singa Nantes et directrice de l’AREA (Association pour la réussite des élèves allophones). Professeur de Français Langue Étrangère (FLE) dans son pays depuis dix ans, elle a fui la dictature de Bachar el Assad qui avait emprisonné et torturé son mari. Avec leur fille de 5 ans, ils sont arrivés en France après une errance de 3 ans, en juin 2015. Il faut l’écouter, Nadia, lorsqu’elle nous raconte son parcours dans un français impeccable : « Je suis arrivée en France, qui était ma passion, avec laquelle j’ai vécu un conte féérique, sur l’air de « il était une fois le pays des libertés… ». Je voulais créer des liens, m’investir localement, partager mes compétences. Mais nous étions des invisibles ».
« On me demande ce que j’étais avant. Mais je n’étais pas, je suis professeur de Français, je n’ai pas abandonné mes compétences en quittant mon pays « .
Nadia Al Soleman
Elle remarque que l’administration française lui demande systématiquement ce qu’« elle était », avant. « Mais je n’étais pas, je suis professeur de Français, je n’ai pas abandonné mes compétences en quittant mon pays », souligne-t-elle avec force. Son message : considérer l’exilé comme une personne humaine, riche de ses savoirs, et non comme un fardeau vaguement menaçant. Et de rappeler cette vérité souvent occultée : 70% des exilés sont des femmes et des enfants.
À l’heure où plus de 10 millions de nos concitoyens ont voté pour des candidats affichant clairement leur volonté de rompre avec la tradition républicaine de l’accueil et du droit du sol, il est bon d’entendre cette voix de femme, cultivée, généreuse et engagée. Elle prouve que « l’innovation sociale et économique se nourrit des migrations et de la création de liens », selon la raison d’être de l’association Singa, créée en 2012. Un message plus que jamais d’actualité.
Xavier DEBONTRIDE