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Transition alimentaire : comment manger moins de viande ?

Laura Sabbado da Rosa (à gauche) et Maud Chever (à droite) ont présenté leurs travaux sur la déconsommation de viande lors de la clôture de la Chaire "aliments - bien manger".
  • En France les végétariens et végétaliens restent minoritaires
 
  • Mais un nouveau profil prend de l’ampleur : celui des flexitariens
 
  • Maud chever et Laura sabbado da rosa, deux chercheures du CREM ont présenté leurs travaux sur la déconsommation de viande
 
  • à l’occasion de la clôture de la chaire aliments – bien manger de la Fondation Université de Rennes
 

Laura Sabbado da Rosa et Maud Chever, deux chercheures du CREM – CNRS (Centre de Recherche en Economie et Management) de l’Université de Rennes ont présenté leurs travaux sur les changements des pratiques des consommateurs qui bannissent ou diminuent la viande de leur régime alimentaire. Cette restitution avait lieu dans le cadre de la clôture de la Chaire aliments et bien manger, organisée par la Fondation Université de Rennes, le 18 avril 2024. L’objectif ? comprendre les transitions alimentaires pour formuler des recommandations aux pouvoirs publics.

Diminuer sa consommation de viande

À l’échelle mondiale, la consommation de viande augmente. Elle suit la courbe de la croissance démographique. En France, en revanche, elle diminue. Si les végétaliens (vegans)  et les végétariens restent minoritaires (2 à 3 %), un nouveau profil, celui des flexitariens, prend de l’ampleur. Il concernerait près de 24 % de la population (Etude France Agrimer Végétariens et Flexitariens en France, 2021) même si les critères pour le définir divergent selon les perceptions.

Les raisons sont multiples, mais ce qui est certain c’est que « de nombreuses recherches critiquent une consommation trop riche en viande, pour la santé et pour l’environnement. Des recommandations de l’OMS et des pouvoirs publics encouragent sa diminution », soulignent Laura Sabbado da Rosa et Maud Chever. Les deux chercheures ont présenté leur travaux sur « la déconsommation de viande » à l’occasion de la clôture de la Chaire, organisée par la Fondation Université de Rennes. 

Les deux chercheures ont réalisé une présentation de leurs travaux menés dans le cadre de la chaire Aliments - bien manger.

«Les individus qui deviennent végétarien/flexitarien ont des prédispositions. C’est ensuite un évènement : la venue d’un enfant, le visionnage d’une vidéo par exemple, qui amorce le changement. »

Maud Chever et Laura Sabbado da Rosa

Une méthodologie qualitative 

Alors, si les consommateurs ont tendance à diminuer ou bannir la viande de leur assiette, comment s’opère ce changement ? Quelles sont les trajectoires et les motivations qui encouragent cette modification ? Comment les routines en sont-elles modifiées ? Et quelles stratégies sont mises en place par les entreprises pour s’adapter à ce nouveau marché ? Pour répondre à toutes ces interrogations, les chercheures ont procédé à une étude qualitative. Elles ont interrogé 25 personnes (un échantillon qui n’est pas représentatif de la population française) en complétant les entretiens par des observations des contenus trouvés sur Internet, sur les réseaux sociaux notamment.

La théorie des pratiques 

Pour comprendre le fonctionnement des transitions alimentaires – et dans leur cas de la déconsommation de viande – les deux chercheures se sont appuyées sur la Théorie des pratiques. À savoir que « pour qu’une pratique se routinise, il faut des compétences, du matériel mais aussi des significations », le sens que l’on donne à la démarche, explique Maud Chever. Ainsi, pour devenir végétarien par exemple, il faut des compétences culinaires mais aussi relationnelles, pour pouvoir augmenter son choix dans les discussions avec les autres. Ou encore des compétences nutritionnelles pour être en mesure de compenser les apports en protéines. Il faut aussi du matériel. « Dans notre étude, on remarque souvent que le premier investissement des végétariens ou des végétaliens est un mixeur, car ils sont plus amenés à transformer leurs aliments », constate Maud Chever. Mais il faut aussi des significations, des valeurs qui motivent  cette réduction de produits carnés : « Pour les flexitariens il s’agit souvent de la conscience écologique », d’après les expertes. Ces compétences, le matériel et les significations divergent en fonction des profils, flexitariens, végétariens, ou végétaliens.

Comprendre les imaginaires carnés pour une communication efficace 

Enfin, en analysant les processus de changement de régime, Laura Sabbado da Rosa et Maud Chever ont remarqué que « les individus qui devenaient végétariens ou flexitariens avaient des prédispositions. « C’est ensuite un évènement : la venue d’un enfant, une vidéo visionnée sur internet, qui amorce le changement ». Les recherches, menées depuis 2021, vont se poursuivre avec l’analyse des données des stratégies des entreprises du secteur agro-alimentaire. L’ensemble de leurs travaux permettront de faire des recommandations aux pouvoirs publics pour accompagner ces changements alimentaires alternatifs et durables. « Il s’agira de penser des outils et des innovations stratégiques pour parler aux déconsommateurs et envisager des stratégies d’adaptation du marché », indiquent-elles. « En comprenant mieux les imaginaires associés aux produits carnés, les communications seront plus efficaces », conclut Maud Chever. 

Adèle CHARRIER

« Le Champ libre », 8000 m2 de fleurs locales et de vergers près des bords de Rance.

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