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Pendant les fêtes, la coquille d'huître se recycle

Plusieurs collectivités bretonnes proposent aux habitants de recycler les huitres pendant les fêtes.(©StockSnap/Pixabay)

 

  • En Bretagne, l’ostréiculture génère 600 tonnes de déchets chaque année
 
  • Mais les coquilles d’huitres peuvent être valorisées 
 
  • En servant de base dans la cosmétique, la peinture, l’élevage, l’agriculture et les bioplastiques 
 
 

Chaque année, en France, 150 000 tonnes de coquilles d’huîtres sont consommées et seules 5 % sont recyclées. Pour valoriser cette matière aux multiples usages, en Bretagne, plusieurs collectivités proposent aux habitants de ramener leurs coquilles pour les recycler. 

Une fois la bourriche d’huîtres terminée, qu’allez-vous faire des coquilles pendant les fêtes ? Les jeter, sûrement pas ! En Bretagne, plusieurs collectivités proposent aux habitants de les recycler. Ces derniers sont invités à les ramener dans des points de collecte, situés la plupart du temps au niveau des déchèteries.

Le Pays d’Iroise Communauté était l’une des premières collectivités bretonne à tester l’expérience (par l’intermédiaire du G4DEC, groupement des déchets de l’économie circulaire partagé entre quatre collectivités : Pays des Abers, Pays d’Iroise Communauté, Lesneven Côte des légendes et Pays de Landerneau Daoulas). 

Après une première édition réussie en 2022, l’opération “Ramène ta coquille” remet le couvert. “L’année dernière, nous avons récolté 2 tonnes de coquilles d’huîtres et de Saint-Jacques ”, se souvient Michèle Hénot, chargée de mission prévention au G4DEC. “Cela a tellement marché que cette année nous allons installer 21 bacs de collecte, contre six l’année dernière. Nous pourrions collecter jusqu’à 150 tonnes”, annonce-t-elle (informations à retrouver ici). 

Anne-Laure Le Niliot, chargée de prévention déchets au Pays d’Iroise, Guy Colin, vice-président aux déchets de Pays d’Iroise Communauté et Maire de Brélès et Michèle Hénot, chargée de de mission prévention au G4DEC.

“Elles méritent mieux que la poubelle”

Une fois collectées, les huîtres sont broyées par la société Sotraval, avant d’être envoyées vers la plateforme de compostage de SEDE Environnement. “Elles sont ensuite compostées pendant plusieurs mois avec des déchets verts”, explique Michèle Hénot. Ce compost est mis gratuitement à destination des habitants. “Pour la première distribution, en mai dernier, 20 tonnes de compost coquillé (2 à 4 % de coquilles) ont été distribués”.

Depuis, d’autres collectivités en Bretagne lui ont emboîté le pas, comme la Communauté d’agglomération de Quimperlé. Pour la première année, la collectivité propose aux habitants qui le souhaitent de recycler leurs coquilles d’huîtres. 17 bacs de collecte seront installés dans les 16 communes de l’agglomération, du 22 décembre au 15 janvier. Une fois collectées, les coquilles d’huîtres vides seront envoyées à l’Usine de Kervellerin, pour être recyclées.

L’intérêt est d’abord écologique : “Il s’agit de sortir ce flux des ordures ménagères qui partent à l’incinération”, indique Michèle Hénot. “Ils méritent mieux que la poubelle !”. D’après elle, “il faut changer le regard sur nos déchets, car ils peuvent devenir une ressource pour d’autres professions”.

« Il faut changer notre regard sur les déchets qui peuvent devenir une ressource pour d’autres professions »

Michèle Hénot, chargée de mission prévention au G4DEC

 

Peinture industrielle, cosmétique… l’huître a de la ressource 

En Bretagne, l’ostréiculture génère 600 tonnes de déchets chaque année. Pourtant, même sans sa mollusque délicieuse, l’huître a du potentiel. Grâce à sa base calcaire, sa coquille peut être valorisée aussi bien dans l’agriculture, que dans l’industrie ou la cosmétique. 

Martine Le Lu, dirigeante de l'Usine de Kervellerin. (©Usine de Kervellerin)

 L’Usine de Kervellerin, basée à Cléguer, dans le Morbihan en a fait son fonds de commerce. “On récupère les huîtres qui sont mortes à cause des conditions climatiques ou victimes de prédateurs naturels », rapporte Martine Le Lu, dirigeante de l’entreprise familiale de 8 salariés. « Le volume varie en fonction des années, et c’est tant mieux pour les ostréiculteurs ». Une fois récoltées, les huîtres sont triées, broyées et subissent plusieurs transformations avant d’aboutir au produit fini : une fine poudre baptisée Ostrécal ®. Cette dernière est multifonction. “Elle entre dans la composition de la peinture des bandes blanches sur la chaussée, mais également de la peinture d’intérieur et d’extérieur”, indique Martine Le Lu. Ostércal est aussi utilisée dans le revêtement de rafraîchissement des toits de l’entreprise CoolRoof. “Nous la commercialisons aussi pour créer des cosmétiques comme exfoliant. Mais elle sert aussi dans l’élevage pour l’alimentation animale grâce à sa teneur en calcium ou comme bioplastique”, poursuit Martine Le Lu, que MAPinfo avait interrogé pour un autre article sur l’économie de la mer. Cette poudre est aussi utilisée par les agriculteurs.

En passant par l’Usine de Kervellerin, les coquilles d’huitres sont broyées pour devenir une poudre nommée Ostrécal. (©Usine de Kervellerin)

La coquille, un fertilisant naturel dans l’agriculture 

Dans l’agriculture, les coquilles deviennent des fertilisants naturels. La société Elementerre, spécialisée dans la fabrication d’amendement et d’engrais naturels, commercialise une autre précieuse poudre, réservée à l’amendement.  “Elle permet d’augmenter le PH des sols, qui sont très acides en Bretagne, mais elle aide aussi les plantes à renforcer leurs tissus, leurs défenses immunitaire et améliore leurs qualités nutritives”, liste Emmanuel Boutet, dirigeant d’Elémenterre “La majorité des agriculteurs biologiques utilisent de la chaux comme fertilisant. L’avantage de la coquille d’huître, c’est qu’elle apporte plus d’oligo-éléments, c’est un amendement doux à libération lente”, souligne le spécialiste. « C’est dans l’air du temps, ça permet de valoriser les déchets d’une filière”. 

Mais la coquille d’huître se décline aussi dans l’art. Comme bien d’autres coquillages de nos côtes, la coquille d’huître devient une source d’inspiration des designers bretons. MAPinfo vous l’avait fait découvrir dans un article il y a quelques mois.

Et les poches ? 

Art, agriculture, cosmétique, peinture… La coquille d’huître a de la ressource. Et sa poche alors ? (sacs constitués de grillage plastique dans lesquels les huîtres sont élevées pour les protéger des prédateurs

Pour aller plus loin dans la démarche d’économie-circulaire, les acteurs du recyclage (G4DEC) et les ostréiculteurs du Finistère-Nord planchent aussi sur le recyclage des poches, “qui ont une durée de vie de 10 ans”, apprend-t-on dans un article du Portail de l’ESS en Bretagne. “Nous avons travaillé avec un ESAT pour concevoir des protections pour les jeunes plants d’arbre dans le cadre d’un projet de plantation porté par le département”, indique Michèle Hénot. En parallèle, l’entreprise Rehab, basée à Concarneau, s’est chargée de transformer plusieurs poches en panneaux signalétiques pour les bacs à marée du parc marin d’Iroise

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